19 juillet 2018 – Un article du Globe and Mail a confirmé ce que certains avait déjà observé : le taux de refus des demandes de visas de visiteur est en hausse alarmante. Qui plus est, les demandeurs de visas devront bientôt fournir leurs données biométriques. Si le visa n’est pas exigé de la part de tous les artistes en tournée au Canada, ceux qui sont soumis à cette exigence auront désormais de sérieux obstacles administratifs et financiers à surmonter.
Taux de refus en hausse marquée
Les ressortissants étrangers qui veulent visiter le Canada doivent se plier à plusieurs exigences avant que ne leur soit accordé le droit d’entrer au pays. Selon leur pays de résidence, ils pourraient notamment devoir obtenir un visa de résident temporaire (communément appelé « visa de visiteur »), devoir fournir leurs données biométriques (photo et empreintes digitales) et/ou devoir obtenir une autorisation de voyage électronique.
À l’heure actuelle, le Canada exige un visa de visiteur aux ressortissants de 146 pays. Ces pays sont situés principalement en Amérique centrale, en Amérique du sud, en Afrique et en Asie.
Bien que les visas de visiteurs n’aient jusqu’à présent représenté un obstacle significatif à l’entrée d’artistes étrangers au Canada, la situation s’est détériorée depuis quelques années et les choses sont sur le point de se compliquer davantage.
Le Globe and Mail a récemment publié un article dans lequel il mettait en lumière des hausses marquées du nombre de demandes de visas et du taux de refus de ces demandes. Voici quelques unes des statistiques obtenues par le Globe and Mail auprès d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada :
- Les nombre de demandes de visa de résident temporaire est passé de 1,2 millions en 2012 à 2,3 millions à 2017;
- Le taux de refus des demandes de visa de résident temporaire est passé de 18 % en 2012 à 26 % en 2017;
- Seulement qu’en 2017, le Canada a refusé un visa à près de 600 000 demandeurs;
- Pendant les trois premiers mois de 2018, le taux de refus a atteint 30 %;
- Les pays d’Afrique et du Moyen-Orient ont les taux de refus les plus élevés.
Ces données concordent avec les incidents rapportés au sein du secteur du spectacle.
Cette augmentation du taux de refus de demandes de visa représente une menace sérieuse pour les diffuseurs de spectacles et les festivals du Canada. Dans la mesure où n’importe quel groupe de musique ou compagnie de théâtre de l’étranger tourne en général avec des équipes comptant bien plus de quatre interprètes et techniciens, les probabilités que l’un d’eux se voit refuser son visa deviennent très élevées. Et la conséquence pour les diffuseurs canadiens – c’est-à-dire l’annulation d’un spectacle – devient très lourde.
De nouvelles exigences relatives aux données biométriques
La démarche pour l’obtention d’un visa de résident temporaire s’encombrera bientôt d’une nouvelle exigence et de nouveaux frais.
À compter du 31 juillet 2018, les visiteurs originaires d’Europe, du Moyen-Orient ou d’Afrique devront fournir leurs données biométriques (empreintes digitales et photo) afin d’obtenir un visa de visiteur. À compter du 31 juillet, cette exigence s’appliquera aux demandeurs de visas provenant de l’Asie, de l’Asie-Pacifique et des Amériques.
Afin de procéder à leur prise de photo et à la saisie de leurs empreintes digitales, les demandeurs de visas devront se rendre en personne dans un centre de réception des demandes de visa (CRDV) dans leur pays ou dans un pays voisin. À toutes fins pratiques, cette exigence aura pour effet de priver les demandeurs de la possibilité de procéder à une demande de visa par la poste. Pour certains demandeurs de visas qui n’ont pas accès à un CRDV à proximité de leur lieu de résidence, cela impliquera du temps et des coûts de déplacement.
La saisie des données biométriques s’accompagnera aussi de frais de traitement. Le coût pour un demandeur individuel sera de 85 $ CAN. Les groupes d’au moins trois artistes de la scène et leur personnel qui présentent conjointement une demande de permis de travail seront sujet à un coût maximum de 255 $ CAN. Cette mesure d’atténuation aura toutefois une portée limitée. En effet, les artistes de la scène qui viennent au Canada dans le cadre d’une tournée (et qui ne sont pas engagés dans le cadre d’une production canadienne) sont exemptés du permis de travail, conformément au Règlement 186(g). Ces artistes en tournée ne pourront donc pas bénéficier du coût maximum prévu pour les artistes de la scène.
Pour les groupes de musiques et compagnies en arts de la scène, les coûts pourraient aisément prendre d’importantes proportions. Par exemple, un groupe de musique typique nécessitant des visas pour tourner au Canada avec cinq musiciens, un technicien de son et un gérant de tourner devra un encourir un frais de 100 $ pour chaque visa ainsi qu’un frais de 85 $ pour chaque saisie de données biométriques. Ça représente une facture totale de 1 295 $ avant même que le groupe n’encoure toute autre dépense de voyage. De tels frais seront irrémédiablement transférés aux diffuseurs de spectacles canadiens. Ils vont ainsi considérablement réduire la viabilité financière de telles tournées.
En savoir plus sur les exigences de données biométriques
Des risques pour les diffuseurs canadiens
Conséquemment à la hausse du taux de refus des demandes de visas et à la nouvelle exigence de données biométriques, l’accueil d’artistes en provenance de pays où les visas sont exigés est en voie de devenir un pratique risquée et coûteuse.
En raison des risques relatifs au rejet des demandes de visas ainsi que des délais qui seront sans aucun doute occasionnés par la saisie de données, les diffuseurs canadiens désirant accueillir des artistes de pays où le visa est exigé devraient :
- Veiller à signer le contrat le plus tôt possible et préférablement au moins un mois avant la mise en vente des billets;
- Encourager les artistes à entamer le processus de demande de visa dès la signature du contrat; et,
- Effectuer un rappel auprès des artistes un mois après la signature du contrat pour vérifier l’état de la demande de visa.
De plus, afin d’amortir les coûts croissants liés aux demandes de visas, les diffuseurs auraient tout avantage à collaborer avec leurs pairs – soit dans le cadre d’un processus formel de programmation en groupe, soit dans le cadre d’échanges informels entre diffuseurs – afin d’ajouter le plus de représentations possibles aux tournées d’artiste originaire de pays où le visa est exigé.
Afin de vérifier si le visa est exigé ou non, veuillez vous référer aux listes d’exigences selon le pays sur le site web d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
CAPACOA collabore actuellement avec la Coalition canadienne des arts et l’Alliance des arts de la scène afin de porter ces enjeux à l’attention des autorités canadiennes. Entre autres choses, un mémoire a été soumis au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international dans le cadre de l’Étude sur l’impact de la culture et des arts canadiens sur la politique étrangère et la diplomatie du Canada ainsi que leur utilisation dans ces domaines.
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