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Les salles de spectacle municipales et les circuits de tournée

Chronique d'une pandémie dans les arts de la scène

Salle de spectacle vide vue du côté jardin de la scène, sous un éclairage bleu.
Dow Centennial Centre Shell Theatre, un diffuseur municipal à la Ville de Fort Saskatchewan, en Alberta.

La subvention salariale d’urgence du Canada devrait permettre à de nombreux organismes du secteur du spectacle de maintenir leur personnel en place pendant la période de confinement. Cependant, les salles de spectacles opérées par des gouvernements ou des institutions d’enseignement n’y sont pas admissibles. Qui sont ces acteurs? Quel rôle jouent-ils (normalement) dans l’écosystème du spectacle? Et quel rôle leur reviendra lors de la relance?

On trouve des salles de spectacles gérées par des « entités publiques » dans tous les ordres de gouvernement, de même qu’au sein d’universités, de collèges et d’écoles. Certaines sont utilisées exclusivement pour des fins éducatives ou communautaires. D’autres programment et offrent des saisons de spectacles à l’intention du grand public.

Le Centre national des Arts et la Place des arts sont deux exemples bien connus de lieux de diffusion de spectacles relevant du secteur public. Au-delà de ces grandes institutions publiques, on trouve aussi au Canada un nombre importants de diffuseurs de spectacles municipaux. Dans le sondage sur L’envergure et les retombées de la diffusion, sur 250 répondants, 21 % (52) faisaient partie de gouvernements municipaux, alors que 3 % (8) faisaient partie d’une institution d’enseignement, d’un gouvernement provincial/territorial ou du gouvernement fédéral.

Selon L’envergure et les retombées de la diffusion :

  • Les diffuseurs municipaux sont parmi les plus gros diffuseurs de saisons de spectacles. Leur nombre médian de spectacles était de 50 en 2017-2018 (comparativement à 33 pour l’ensemble des répondants). Le montant médian des cachets versés à des artistes était de 126 000 $ (comparativement à 82 500 $ pour l’ensemble des répondants).
  • Les diffuseurs municipaux sont proportionnellement moins nombreux à bénéficier de l’appui du Fonds du Canada pour la présentation des arts. 35 % des diffuseurs municipaux reçoivent ce financement (comparativement à 62 % pour l’ensemble des répondants).
  • Les diffuseurs municipaux sont des employeurs importants. Le nombre médian d’employés à temps était de 7 (comparativement à 4 pour l’ensemble des répondants). Ce nombre n’inclut pas les nombreux travailleurs à temps partiel, occasionnels ou à contrat.
  • Les « autres diffuseurs » répondants, qui n’étaient ni municipaux, ni OBNL, avaient un profil assez similaire aux diffuseurs municipaux. Ce groupe comprenait notamment des diffuseurs universitaires ainsi que des corporations relevant de gouvernements provinciaux/territoriaux et ou du gouvernement fédéral.

Aucune de ces « entités publiques » de diffusion n’est admissible à la subvention salariale d’urgence du Canada. À moins d’avis contraire, ils ne seront probablement pas non plus admissibles au Fonds d’urgence annoncé le 17 avril. Pourtant, ils sont des acteurs importants de l’écosystème des arts de la scène et des étapes indispensables dans les circuits de tournée – notamment en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique où l’on retrouve des proportions importantes de diffuseur municipaux.

« Un grand nombre d’entre nous opérons dans un contexte municipal ou universitaire. Il n’y a donc pas de soutien provincial à la diffusion et notre réseau dépend largement de l’appui du fédéral. Ces salles [municipales et universitaires] constituent des étapes pour plusieurs tournées pancanadiennes. Sans ces accueils, les tournées se compliquent rapidement sur le plan logistique et nos artistes canadiens de renom s’en trouvent directement affectés. »

Josh Gennings, superviseur du Théâtre Shell à la Ville de Fort Saskatchewan, lors d’une consultation menée par CAPACOA

Les diffuseurs municipaux facilitent la tournée interprovinciale. Ils sont aussi des points d’ancrage pour un grand nombre d’autres diffuseurs à but-non-lucratifs situés dans des régions rurales ou éloignées. Ainsi, lorsqu’une tournée interprovinciale est rendue possible grâce à des diffuseurs municipaux, d’autres diffuseurs s’y greffent et permettent à leurs auditoires de voir des artistes qui n’auraient pu se rendre jusque dans leur collectivité sans la participation des diffuseurs municipaux.

Malheureusement, tant les diffuseurs municipaux que les diffuseurs à but non-lucratif vivent des heures incertaines. Personne ne sait vraiment quand les salles pourront rouvrir ou si les publics seront au rendez-vous. En outre, les diffuseurs qui opèrent au sein d’une bureaucratie municipale ou universitaire sont entièrement dépendants de décisions prises dans d’autre partie de l’appareil gouvernemental, ce qui complique d’autant plus la reprogrammation des nombreux spectacles reportés.

Selon les informations partielles disponibles, la plupart des diffuseurs municipaux arrivent pour l’instant à maintenir leurs effectifs à temps plein. Leur travailleurs à temps partiel et occasionnels ont quant à eux été licenciés ou alors ne sont pas appelés. Si toutefois le nombre élevé de licenciements dans le secteur des bibliothèques devait être un indicateur de ce qui s’en vient pour les diffuseurs municipaux, alors il risque de ne plus y avoir personne au bout de la ligne lorsque viendra le temps de relancer les activités de diffusion. Déjà, au moins cinq municipalités ont redéployé leur personnel de diffusion vers d’autres unités. Est-ce que ces travailleurs seront réaffectés à la diffusion de spectacles au terme de la crise?

Il est difficile de prévoir comment les diffuseurs relevant du secteur public arriveront à passer au travers de la crise de la COVID-19 sans une aide du gouvernement fédéral. Par contre, lorsqu’enfin les activités de tournée pourront reprendre, on sait d’emblée qu’ils auront plus que jamais un rôle crucial à jouer dans la relance du secteur du spectacle.


La pandémie de COVID-19 apporte son lot quotidien de perturbations et de réponses des gouvernements. Diffuseurs, agents et artistes tâchent tous de s’y retrouver et de s’adapter à une nouvelle réalité que nous peinons à saisir, tant elle évolue rapidement. C’est pourquoi CAPACOA, avec la collaboration d’Ontario Presents, a entrepris de documenter l’état changeant de la situation, telle que vous nous la rapportez lors de nos rassemblement en ligne. Nous publierons ainsi sur une base hebdomadaire les chroniques d’une pandémie dans les arts de la scène.

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